La couleur chez les Grecs

Art et science

 

 

 

 

 
   

Définitions : controverses

Synesthésies

Dire la couleur

 

 

 

 

 

 
 
 

 

Matérialité / immatérialité ?

Mimésis / ornement ?

Dessin / couleur ?

Couleurs / rhétorique ?

Tétrachromie /mélanges ?

 

 

 
 
 

 

 

 
 
 
   
                 
 
Dessin / couleur ?  
   
L’opposition du dessin et de la couleur – rendue célèbre durant la Renaissance par l’affrontement entre les tenants florentins du disegno et ceux, vénitiens, des colori – posait déjà problème dans l’antiquité. Si la notion de dessin inclut souvent aujourd’hui celle de couleur, c’était loin d’être le cas pour des penseurs tels qu’Aristote ou Platon que la question divise comme en témoignent ces deux passages cités par Gage : " Notre discours, au contraire, fait absolument l’effet d’un tableau assez bien dessiné dans ses lignes extérieures pour avoir l’air achevé, mais à qui manque encore le relief que donneront la peinture et l’harmonie des couleurs " (Platon, Le politique, 277b-c), et " Celui qui jetterait au hasard les couleurs les plus belles ne charmerait jamais la vue comme celui qui a simplement dessiné une figure sur fond blanc " (Aristote, Poétique 1450a-b).
Au 18ème siècle, Diderot reprend cette opposition entre dessin et couleur dans sa Lettre sur les aveugles : il affirme que l’aveugle est tout à fait en mesure d’apprécier l’art du dessin mais pas la sensation de couleur car : " l’aveugle né, ne pouvant colorer, ni par conséquent figurer comme nous l’entendons, n’a mémoire que de sensations prises par le toucher " (Diderot cité par Le Rider, p. 32).
L’antinomie classique dessin/couleur rejoint la problématique de la mimésis, puisqu’une simple esquisse est considérée plus pure et plus artistique que des taches de couleurs (le dessin est l’âme de la représentation), mais seule la couleur est susceptible de lui donner vie, corps, relief et de reproduire ainsi le réel. Cette controverse se poursuit jusqu’au 17ème siècle comme le prouve cette affirmation de Charles Le Brun : " Tout l’apanage de la couleur est de satisfaire les yeux, au lieu que le dessin satisfait l’esprit ". Le débat se voit même " sexualisé" au 19ème siècle par Charles Blanc, héritier de Chevreul, théoricien des lois de contrastes chromatiques : " le dessin est le sexe masculin de l’art ; la couleur en est le sexe féminin " (Imdahl, p. 23). On retrouve ici l’accusation platonicienne à l’encontre de la couleur perçue comme « fard », à la manière du maquillage féminin affectant les sens.