Imposte de porte ? Ciel de
nos marelles d’enfants ? Paravents chinois ? Peut-être… mais
diptyque, de toute évidence. Regardons : le panneau
du haut ? Avec un tel dispositif, le regard est contraint à d’incessantes
allées et venues entre les deux hémisphères, à la
fois semblables (même forme, prédominance de la
couleur
bleue) et pourtant
foncièrement différents
: l’un est figuratif, l’autre non ; azur franc
de l’un, faux semblants violets de l’autre. Deux
panneaux que le dispositif paradoxal du diptyque tend à identifier,
sur le mode du miroir. Le principe de représentation
- figuré de manière indicielle sur le panneau
supérieur - serait-il renvoyé au néant
du panneau inférieur? Inversement, le panneau non figuratif
ne deviendrait-il pas, à son contact, figuratif (ciel-lac)
? Spécularité analogique encore plus troublante,
lorsque l’on apprend que le panneau abstrait n’a
pas été peint par l’artiste, mais trouvé dans
la rue. Buraglio renvoie dos à dos, en les assimilant,
son propre travail d’artiste, et un
prélèvement
brut de la réalité.
Dans ce jeu spéculaire où les panneaux s’annulent,
ou cumulent par contamination leurs significations respectives,
que reste-il à la peinture ? - L’objet diptyque.
Et le plaisir d’une immersion dans ces bleus dont le support
cintré renforce encore le caractère atmosphérique. « Comment
réprimer le désir de fenêtre ouverte sur
une couleur bleu ciel ? » demandait Marc le Bot. Les pins
parasols sont peut-être bien à cet égard,
une nouvelle version des emblématiques « Fenêtres » de
Buraglio dont Gilles Aillaud résume bien le fonctionnement
: « Plus ils sont écran, plus ils parlent de l’ouverture ».
Paradoxe et prodige de cette oeuvre qui, tout en refusant tout
illusionnisme par la mise en avant du support, ouvre le champ à une évasion
nouvelle de l’esprit, dans la matière même.
Diptyque certes, mais aussi imposte de porte, ciel de nos marelles
d’enfant, paravents chinois…