L’hypothèse
du tableau recadré.
Un petit tableau devant lequel on serait peut-être
passé sans faire attention. Une toile comme on croit
en trouver des dizaines dans les musées de France.
Discret, ce petit paysage. Deux élégants pins
parasols s’élançant sur fond de mer,
dans une lumière toute méditerranéenne.
- Rien de plus ? - Que si ! Ces pins ont été victimes
d’un détournement de support des plus scandaleux:
la toile sur laquelle ils étaient originellement peints,
de forme ovoïde, a été retendue dans un
cadre rectangulaire. Premier indice : la toile vierge autour
de la représentation est exposée, de sorte
que le regard du spectateur sort de la représentation
illusionniste pour entrer dans le processus même de
fabrication du tableau. Deuxième indice : les
"calottes" supérieures
et inférieures de l’ovale sont tronquées.
Tronquée également, et c'est nettement plus
troublant, la signature de l’artiste. Suspectés
: Ravier lui-même / quelqu’un d’autre :
caprice de collectionneur ? Expédient d’un encadreur
en rupture de stocks ?! La première hypothèse
semble insoutenable, compte tenu de la formation et des partis
pris esthétiques très classiques de Ravier
(- à noter, la présence d’autres toiles
ovales dans sa production, encadrées de manière
tout à fait conventionnelle). - Alors ? Qui donc aurait
eu l’idée de s’attaquer à ces inoffensifs
pins parasols ? On sait que lors de son acquisition par le
musée des Beaux-Arts de Lyon en 1959 la toile se présentait
déjà telle qu’on la voit actuellement.
Les tentatives de prendre contact avec M. Lorenceau, le précédent
détenteur des Pins, restent infructueuses. L’enquête
inaboutie, le mystère reste intact.