Etienne Martin - La sauterelle
Cette statue en plâtre de 1933, première sculpture d´Etienne-Martin, est un nu qui se partage entre l´exhibition d´une féminité très humaine, et un hiératisme empreint de l´influence de l´art égyptien, qui lui confère un caractère presque divin.
SEXE.
Corps musculeux et compact, que l´auteur n´ébarbe pas, ne cisèle pas, ne retouche pas.
Surface brute et rugueuse, im-polie.
Usage d’un matériau qui accentue le trait et la grossièreté du contour ; mise en valeur du plâtre en lui-même et, par là, d´une chair qui n´a pas besoin du lissé de la forme pour séduire.
Féminité primordiale, sauvage, débordante. Oeuvre fortement sexualisée - l´une des plus sensuelles, sans doute, depuis Rodin.
Un corps pas mûr, adolescent - mais une nudité sans séductions raffinées ni clignements d’yeux experts : la Sauterelle offre à celui qui la regarde la possibilité de retourner aux origines a-culturelles de toute sexualité, de l’évoquer avant ou au-delà de tout stéréotype culturel.
MYTHE
Urmutter, Venus paléolithique, Prêtresse égyptienne, elle incarne le mythe du féminin: une femme dont le corps contient le mystère de la vie, et de son éternelle procréation.
Etienne-Martin nous fait entreprendre un voyage initiatique autour d´une figure qui se laisse approcher seulement à distance respectueuse : attitude, regard et format imposent le respect ; archétype d´un idole dont l´expressivité est concentrée sur un regard qui n’est pas celui d´une femme spécifique, mais qui aspire à l´universel, à un ordre éternel.
Eternel comme l´iconographie millénaire à laquelle renvoie sa pose statique et sacerdotale : la position des bras sur les hanches, une jambe tendue devant l´autre, les deux pieds qui s’appuient sur le sol, la coupe symétrique d´une ligne imaginaire qui, du centre du front, descend au centre des jambes.
Cette Sauterelle – dont le nom renvoie peut-être à la sécheresse des traits, mais aussi à l’absence de « grâce », totalement assumée par l’artiste, de la figure, s´anime de toutes ces ambivalences.


 
  ÉTIENNE-MARTIN
Loriol (Drôme), 1913 - Paris, 1995

La Sauterelle
1933
Plâtre
H. 1,64 ; L. 0,38 ; P. 0,53

Inventaire 1996-93