Cela ne m’ennuie jamais de montrer
des œuvres anciennes mais je préfère toujours avec
des nouvelles. Cela permet de souligner la récurrence des thèmes,
de montrer que l’on dit toujours la même chose, autrement.
Malgré la coupure dans mon travail, le changement de mode de vie,
les grands événements de la vie, je retombe toujours sur
mes pieds.
Les Dessins d’après,
c’est aussi, pour vous, retomber
sur vos pieds ?
J’ai très tôt pensé qu’il fallait dessiner comme
autrefois. J’ai repris ce que j’avais abandonné très
violemment et très délibérément dans ma jeunesse.
C’est devenu un exercice, je me suis pris au jeu, et cet exercice a donné des dessins qui
ont un intérêt pour eux-mêmes. Il y a sûrement
un décalage par rapport à la continuité des Fenêtres,
Châssis, Masquages… Peut-être un jour l’interpénétration
sera-t-elle plus grande. Mais on peut dire qu’ils sont du même ton
: le type de matériaux auxquels il est recouru, les postures qui président à leur
fabrication sont les mêmes.
N’y a-t-il pas dans ces dessins l’aveu de cette "nostalgie
de la grande peinture" que vous avez déclaré ?
On ne fait pas toujours ce que l’on veut. Ce
ne sont pas les peintres qui font la peinture, mais la peinture, les peintres.
Si j’avais le choix, je peindrais sur toile, avec de la peinture à l’huile.
Je m’étonne – et c’est ce qui m’éloigne
des étudiants – de ce qu’ils ont l’air toujours contents
de ce qu’ils font, sentiment que je n’ai jamais éprouvé.
Quand je vois un petit morceau de toile sur châssis qui peut donné la
pyramide de fraises de Chardin, je ne peux pas être content. Il y a peut-être
dans mes dessins une compensation à cette nostalgie-frustration dont
j’ai parlé. Pourtant, il me semble que
quand j’agis sur un châssis, je suis déjà dans une
situation de prémisses à une peinture possible.
Pierre Buraglio Entretien, en juillet
1988, avec C.P. pour Octobre des Arts. (1988)[pp.146-147]
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